Le paysage est exceptionnel, avec le soleil matinal sur Roc Noir.
En 1950, l'équipe de recherche d'itinéraires d'approche de l'Annapurna I, à nommé cette immense crète «La Grande Barrière» pour son aspect infranchissable et le sommet «Roc Noir» (Khangsar Kang) nommé ainsi à cause de ses faces tellement verticales que la neige ne s'y accroche pas.J'arrive enfin au lac ; avec le vent il ne fait pas chaud et c'est un euphémisme, je mets tous les vêtements que j'ai dans mon sac (6 ou 7 couches). Dans leur grande majorité, les trekkeurs qui vont au lac Tilicho, vont jusqu'au panneau informatif (sur lequel il est proclamé «lac le plus haut du monde»), prennent quelques photos, restent un moment et repartent. Moi je me voyais mal me contenter de ça en pareil lieu. Je décide de continuer pendant un moment la trace damée par les trekkeurs qui passent par le col Mesokanto, puis je bifurque dans la neige (lentement parce que marcher dans la neige à 5000 m c'est assez exténuant, et là je suis content d'avoir incorporé mes guêtres à mon paquetage) pour rejoindre un petit promontoire au bord du lac d'où la vue est MAJESTUEUSE.
Alors que j'étais tranquillement en train de manger mes pains tibétains (goût assez proche de nos bugnes), je vois un gros paquet de neige dévaler sur le versant opposé.
Après une dernière bonne grimpette, j'arrive à une pancarte «High Camp (4800 m)», je suis tellement étonné d'y être déjà arrivé que je demande à plusieurs personnes si je suis bien au High Camp (le mec relou quoi), je me croyais à Thorong Phedi (4420 m). Bref, après avoir pris une chambre et une petite bouffe, je pars faire ma balade d'acclimatation quotidienne et je monte, je monte, je monte... jusqu'à ce que j'aperçoive au loin le panneau marquant le Thorong La Pass. Je ne peux retenir quelques larmes, non pas que la vue soit magnifique, comparée au Tilicho Lake par exemple, mais cette arrivée impromptue, seul, au col, symbolise sûrement tous les efforts consentis pendant ce voyage et les autres pour essayer d'aller voir un peu plus loin et un peu plus haut que le bout de mon nez. Bref, que d'émotions inexpliquées, mais ce n'est pas vraiment l'endroit pour commencer une analyse ;o).
Maintenant ça y est je suis au col, à défaut d'y trouver la réincarnation de Lacan, j'y trouve un vendeur de thé dans sa petite cabane et un couple s'apprêtant à basculer dans la descente de l'autre versant. Je les prends en photo pour immortaliser cet instant, en retour le monsieur me propose de me rendre la pareille, sympa, mais j'ai déjà assez du mien (ça c'est de l'humour des 5000 ;o) oops). Et donc voici le cliché (profitez en bien, c'est la seule photo de moi). Pour parfaire mon acclimatation qui est déjà assez bonne, je passe un bon moment à faire des abstractions photographiques de drapeaux de prières, à discuter un peu avec le tenancier de la cahute. Au moment où je m'apprêtais à repartir, le taulier me fait signe d'attendre, et je le vois fermer boutique puis il me précède dans la redescente vers High Camp. Je ne suis pas peu fier d'avoir le «gardien» du col comme escorte, amusé de voir dépasser d'une poche de sa veste les pattes d'un poulet qu'on lui a donné, rassuré de le voir se prendre deux-trois gadins (eh finalement non, les Népalais ne sont pas des extraterrestres, contrairement à ce que l'on pourrait croire en voyant les porteurs). Et hop, une pause clope (pour lui, je ne fume toujours pas). De retour au lodge, dans mon sac, j'ai 8 piles AAA et une frontale prévues initialement pour faire la montée de nuit et dans le froid jusqu'au col. Sachant maintenant que ça ne va pas se passer tout à fait comme cela, je m'octroie une bonne pause détente d'écoute de mon lecteur MP3.